jeudi 10 mars 2011

Pourquoi améliorer la condition des femmes ?

Moi, comme ça, à froid, je dirais qu'il n'y a pas besoin de trouver une raison, que la condition des femmes doit être améliorée parce qu'on en a besoin, parce qu'on a droit à la dignité, et à la sécurité comme n'importe quel être humain. Mais il semble que ce ne soit pas suffisant : si ça l'était, ça progresserait plus vite. On voit donc apparaître d'autres réponses à cette question.

Un grand merci à Roselyne Bachelot pour nous avoir fourni la réponse le 7 mars : parce que ça coûte cher ! En effet, lundi dernier, lors de l'annonce d'un troisième plan contre les violences faites aux femmes, Mme Bachelot a rappelé que "On estime (...) toutes ces violences, (à) un coût de 2,5 milliards (d'euros), en soins de santé, en prise en charge sociale, en perte pour la richesse nationale (en raison) des décès, des incapacités. C'est tout de même considérable". Ca, c'est un argument qui va faire plaisir aux concernées. Pas un mot sur la dignité et la sécurité des victimes, tout au long de l'article, en revanche.
Claude Guéant, dans le même article, ne fait pas mieux. Pour lui, l'augmentation des chiffres de la violence est due à une meilleure observation de ces violences. C'est donc une bonne nouvelle, le gouvernement fait son boulot, circulez, il n'y a rien à voir. Il n'a peut-être pas tort, mais rien ne prouve que l'augmentation des violences relevées ne soit due à 100% qu'à cela. M. Guéant rame allègrement contre la falaise pour nous faire croire que le gouvernement a de super résultats. Et si, au lieu de se féliciter d'observer mieux un phénomène qu'on a connait depuis 2000 (l'année de l'ENVEFF, allez consulter ma page de statistiques), on s'employait sérieusement à le résoudre ?

Un autre réponse nous vient du Canada, dans un article paru dans Canoe : "Toute amélioration de la condition féminine ne peut qu’avantager la condition des hommes, des enfants et de la société". Ah ben voilà ! Améliorer la condition des femmes, c'est pour améliorer la condition des zommes et des gosses !
Il est hilarant du début à la fin, cet article. Au tout début, je lis : "La Journée de la femme du 8 mars a été créée il y a plus de 100 ans. On ne peut qu’applaudir à cet anniversaire qui souligne les immenses progrès réalisés pour l’amélioration de la condition féminine". Ca fait plaisir, cet optimisme, quelque part : le 8 mars, ne voyons pas ce qu'il reste à faire, voyons plutôt ce qu'on a fait. C'est pas constructif du tout, mais ça permet d'avoir la banane en offrant un bouquet de roses (en promo chez Interflora) à sa secrétaire.
Après, on nous parle du "féminisme sain" (qui, comme c'est surprenant, n'est célébré que sur ses faits d'armes passés, comme s'il n'avait plus lieu d'être aujourd'hui) et du "féminisme malsain". C'est comme les bons chasseurs et les mauvais chasseurs, avec le pauvre mâle dépouillé de sa virilité triomphante dans le rôle de la galinette cendrée qui se fait plumer. J'aimerais bien qu'une fois, rien qu'une fois, un article de ce genre cite une féministe connue tenant le genre de propos "malsains" qu'on nous prête couramment. Je passe sur les raccourcis hâtifs de l'auteure qui doit avoir de drôles de fréquentations pour avoir cette vision du féminisme. Ou tout simplement, elle n'y connait rien et ressasse des clichés, c'est plus facile que réfléchir pour pondre un article intelligent et documenté.

Et puis il y a ceux qui ne croient pas que la condition des femmes doive être améliorée. C'est plus simple, ça dispense de trouver des raisons à deux balles. Parmi ceux-là, nous trouvons notre cher président qui nous a sorti que la Journée des Droits des Femmes, "C'est sympathique, il faut le faire, enfin parfois il faudrait qu'on se concentre sur l'essentiel [...] L'essentiel, c'est de trouver du travail pour les hommes et les femmes, une possibilité de promotion sociale pour les deux [...] Aujourd'hui d'ailleurs, la vie des femmes ressemble à la vie des hommes, les choses ont changé considérablement, considérablement". Circulez, il n'y a rien à voir, il n'y a pas de problème spécifique aux femmes. Trois associations féministes (Osez le Féminisme !, le Planning Familial et Femmes Solidaires) se sont insurgées contre ces déclarations et ont publié aujourd'hui une lettre ouverte pour rappeler au président que nous ne vivons pas dans un monde de Bisounours où tout le monde serait pareillement au chômage. Faut dire que s'il se documente sur la condition des femmes auprès de Chantal Brunel, on n'est pas sortis de l'auberge...

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